Châteaux et repaires de Malemort

Conférence « Repaires et châteaux Malemort » par Marguerite Guély

Carte-Malemort-chateaux-malemort
Carte ancienne localisant les 4 châteaux de Malemort

Sommaire

  • PUYMARET fief avec justice : dépendant de l’évêque de Limoges 
  • LE PEYROU : dépendant du prieur de Brive 
  • LA GRANDE BORIE ou LE FAUX : dépendant du vicomte de Turenne prieur de Brive 
  • LE JAYLE : dépendant de l’évêque de Limoges 
  • L’IMBERTIE ou petite borie ou borie de Saint Clément – Palisses – Arjassou- Neuvers- Le fief de la Tour autrement Saint Victour – Les Bourriottes – Yssandoulier – la Bastide 

PUYMARET

Site de colline à 170 m dominant la vallée de la COUZE, très habitée au temps des Celtes et des Gallo-Romains. Le fief de Puymaret s’étend exactement à l’emplacement et aux abords du site gallo-romain abandonné au Ille siècle.

L’origine du Fief

Deux Thèses s’affrontent :
Pour les seigneurs de Puymaret, c’est un fief appartenant aux BERNARD de SAINT MICHEL, possessionnés à Sainte Féréole et Saint Germain les Vergnes. Ils sont co-seigneurs de Malemort et rendent hommage directement à l’évêque de Limoges.
Pour les seigneurs de Malemort, les Malemort et les Turenne, puis les Noailles, Puymaret n’est pas qu’un simple fief ou arrière-fief dont le seigneur est leur vassal. Ils disent même qu’au XVe siècle, une femme « roturière », Catherine de la Renaudie, l’a transmis aux BAR. GRÂCE AUX PROCÈS qui ont été incessants entre les seigneurs de MALEMORT et de Puymaret, nous avons beaucoup d’actes anciens, recopiés par les uns et les autres.

Les seigneurs de Puymaret

LES BERNARD DE SAINT MICHEL : Puymaret serait la dot d’ALAÏS de Malemort mariée en 1133 à Gérard de Saint-Michel. La dernière des Saint-Michel, Jeanne épouse de Guillière de Cornil, aurait donné la seigneurie de Saint Michel aux Cornil, mais elle n’a pas d’enfants. Sa mère ? Catherine de la Renaudie, veuve de Bernard de Saint serait la dot d’ALAÏS de Malemort mariée Jean de la Chapoulie marié à Catherine Fouchier d’où MARIE DE LA CHAPOU LIE mariée à JACQUES DE BAR ou MONCEAUX.

LA FAMILLE DE BAR CONTESTE CETTE VERSION ET DIT QU’ISABEAU FLAMENC, mère de Jacques, a reconnu tenir de l’évêque de Limoges dès 1432 le repaire de Puymaret et devoir 27 setiers de seigle, 7 setiers d’avoine 45 sous et jouir de la haute justice
Quoi qu’il en soit, la famille des seigneurs de Bar, ou Monceau, s’installe à Puymaret, Saint Germain les Vergnes, Sainte Féréolle, Cornil tout en conservant la seigneurie de BAR.
Le vicomte de Turenne leur interdit de faire une forteresse avec créneaux mâchicoulis et archères. Il leur démolit leurs piliers de justice. Les Nozières, successeurs des Malemort, leur contestent les droits de bancs ou de litres à Saint Xantin ou font démolir leur moulin sur la Couze.

LA FAMILLE de BAR
En 1539, les deux fils de Raymond de Bar, Annet et François, se partagent leurs biens. Annet prend Puymaret et Bar, François garde Cornil et Ussac. Le fils d’Annet et de Marguerite de Beynat, Guy, épouse en 1562 Jacquette de Veilhan, reste catholique dans une vicomté protestante, ce qui le met aux prises avec le vicomte Henri de la Tour, mais lui apporte l’aide des NOAILLES, co-seigneurs de Malemort en 1581.
Charles de Bar et son épouse Jacqueline de Langheac, puis Guy Il marié à Jeanne de Geneste sont des hommes de guerre. Durant la Fronde, Guy Il est un fidèle de Mazarin et le geôlier du prince de Condé. Ils sont dépensiers et dilapident petit à petit leur riche patrimoine.
Armand Jules de Bar suit leur exemple. Il vend la Grande Borie en 1695.
En 1704, son procureur Louis d’Ambly vend Puymaret pour 15 000 livres à Guillaume Couderc, avocat de Brive. C’est un bourgeois et Puymaret est un fief avec justice. Un procès s’ensuit avec les héritiers de BAR.
Mais l’épouse de Guillaume Couderc, Jeanne Dubois, est apparentée au cardinal Dubois. Guillaume obtient le rétablissement du culte dans la chapelle de Puymaret.
Sa fille unique MARIE épouse en 1700 de Jacques Joseph Sahuguet d’Amarzid, prévôt général du Limousin fait passer Puymaret aux Sahuguet, famille riche et puissante.
Les fils de Jacques Joseph sont anoblis. Leur sœur Catherine veille sur Puymaret et sur les enfants de son frère le général.
Elle correspond avec son frère I’Abbé seigneur d’Ussac et avec son frère gouverneur des Invalides.
Puymaret est pillé en octobre 1791. Catherine meurt en 1803, léguant Puymaret et l’hôtel Labenche à son neveu Jean Verlhac. Caroline de Verlhac sa fille va transmettre Puymaret à son mari Jean de Corn.
À la mort de Jean de Corn, en 1856, son fils aîné Mercure a acheté le Jayle et son fils cadet Lof vit à Puymaret. Époux de Gabrielle de Caissac, il a une fille qui transmet Puymaret aux Peyronenc, puis aux Duchamp jusqu’en 1939.

LE PEYROU

LE PEYROU élevé sur une terrasse a fort bon air avec ses deux tours, nous dit Mme Macary dans les années 1960.
Ce n’est plus le cas. Il est totalement encerclé par la marée pavillonnaire.
Jusqu’en 1477, ce n’est qu’un village cité dès 1048 et appartenant alors à Alberga Bonasias. Il appartient au prieuré de Brive et il est habite en 1477 par Martial du Peyrou et sa femme Marie de Puy de Noix.
Au XVIe siècle, Jean Prouhet, bourgeois et marchand de Brive, commence à y acheter des terres.
Son fils Jean Il est élu pour le roi, fermier des terres du prieur de Brive, tuteur de François Il de la Tour, héritier de son oncle Salviot, prieur de la Saulière et baron d’Ardenne.
C’est sans doute lui ou son fils Jean Ill qui construit le château.
En 1567 et 1575, il rend hommage directement au roi, après avoir acheté les rentes de la seigneurie au prieur de Brive.
En 1 590, sa fille et héritière, Marie, le porte a son mari, Jean Il Lasteyrie du Saillant.  Les Lasteyrie refusent de dépendre de la Justice de Malemort et ont des procès avec les coseigneurs de Malemort : les Turenne et depuis peu, les Noailles.
Vers 1647, ils préfèrent vendre le Peyrou à François de CORN.
François de Corn est un cadet d’une famille de très ancienne noblesse de Queyssac en Limousin et d’Anglars en Quercy. Il achète le Peyrou grâce à la dot de sa femme, Marie d’Estresses. Il se font bâtir en 1663 une chapelle à Saint Santin.
Leurs fils François Il épouse Catherine de Montesquiou.
Il achète en 1689, à Guy de Bar, le domaine de la Petite Borie ou L’Imbertie, domaine noble, valant 5 500 livres.
Joseph, syndic de la noblesse du Limousin en vicomté de Turenne, épouse Marianne de Métivier d’ALTILLAC.
Il est en procès avec le collège de Brive qui prétend avoir des droits sur la petite borie. Il n’a qu’un seul enfant Jean de Corn qui se marie en 1738 à Catherine Duroux.
 En 1742, Jean de Corn rend hommage au duc de Noailles devenu seul seigneur de Malemort.
Les DUROUX n’ont jamais été seigneurs du Peyrou comme le croit l’abbé Celerier. En revanche, ils sont seigneurs du Chambon de Saint Hilaire Peyroux et surtout ils ont beaucoup de rentes a BRIVE et des alliances avec les grands bourgeois de Brive en voie d’anoblissement. Catherine est fille unique.
Ce fils unique et cette fille unique ont 11 enfants, dont 3 fils.
Guillaume Joseph et Zacharie Jean font une carrière militaire, au régiment de Bourbonnais. Ils participent à la guerre d’indépendance, en Amérique, sous les ordres de Rochambeau. Guillaume Joseph épouse en 1779 Mane Therèse d’Escorailles. Biens des époux : 30 000 livres.
Ils ont Jean né en 1784 et Adeline née en 1787. Lorsque la Révolution s’accentue, les deux frères émigrent.
Leurs biens de Brive et de Malemort sont confisqués et vendus. Le Peyrou est acheté par Mercure Fraysse ancien régisseur. L’abbé Celerier prétend qu’il l’avait acheté pour le lui rendre après la Révolution et que, de retour d’émigration, Guillaume Joseph « ne se préoccupa pas » de le recouvrer. C’est inexact. Mercure Fraysse lui avait proposé de le lui revendre et Guillaume Joseph était ruiné ! FrançoIs (alias Mercure).
La famille Fraysse le conserve donc jusqu’en 1900 où il est vendu aux Laurent. Le Peyrou avait été adjugé en l’An 2 pour 39 600 L.
La petite borie ou L’Imbertie pour 42 700 L.
Le reste des biens de Malemort pour 50 000 L.
À titre de comparaison, les terres des Noailles à Malemort 282 600 livres. 

LA GRANDE BORIE

Une borie peut être une petite ferme, mais dans la banlieue d’une ville, c’est un domaine bourgeois, par opposition au château ou repaire qui est un domaine noble avant d’être un domaine bourgeois, le lieu s’appelle LE FAU.
Puis il prend le nom de ses propriétaires successifs : LA BORIE DE LA FORESTIE, LA BORIE DE SAINT CLÉMENT (LES PROUHET, seigneurs de SAINT CLÉMENT) et enfin LA GRANDE BORIE pour la distinguer de la petite borie ou L’IMBERTIE.

Les étapes

Au XVe siècle, la borie appartient à la famille de LA FORESTIE, bourgeois et marchands de Brive. François de la Forestie la vend vers 1 530 au vicomte François de la Tour, qui semble vouloir en faire un pied à terre. En 1534, François de la Tour l’échange avec Jean Prouhet, élu pour le roi, seigneur de Saint Clément d’une famille bourgeoise de Brive. La borie doit une rente au prieur de Saint Santin. Elle possède la chapelle Notre Dame de Pitié dans l’église. Elle est rattachée à la seigneurie de Saint Clément. Au XVIIe siècle Madeleine de Prouhet en épousant Gilles de Geneste, baron de Saint Auid, lui apporte Saint Clément et la borie en 1624. En 1656, Jeanne de Geneste, mariée à Guy de Bar, le fait seigneur de Saint Clément et de la BORIE.
En 1695 Armand Jules de Bar et sa mère Jeanne de Geneste vendent la Grande Borie ou borie de Saint Clément à un bourgeois de Brive, Michel Noiret. Ils lui vendent également un domaine à Migoule. Vous voilà MONSIEUR DE LA GRANDE BORIE ou de SAINT CLÉMENT mais il faut toujours dire que vous n’y trouvez pas la moitié du revenu de votre argent.
Il faut planter une charmille, semer des glands ; M. de SAINT JAL vous prêtera 7 ou 8 jardiniers. Vous aurez des poires d’été, des poires d’hiver, des pommes et des abricots mieux que fruits à noyaux qui pousseront mieux à Migoule, à cause du bon air. Migoule sera votre secours de l’automne. Les NOIRET possédaient déjà le domaine de PALISSE acheté aux Laporte de Lissac et le domaine du Breuil. Ils sont les plus gros propriétaires fonciers de Brive et Malemort. Ils rachètent aux pères de la Doctrine Chrétienne, héritiers du prieuré de Saint Santin, la rente due sur la Grande Borie, ce qui leur permet de la qualifier de repaire noble ou de château. Ils rendent hommage au vicomte de Turenne, puis en 17 40 au duc de Noailles. Le Domaine noble, qui vaut 1 0 000 livres, confronte Palisse, la Garenne Verte, le chemin de Brive à Saint Santin et le chemin de Brive à Beynat. Les Noiret sont anoblis en devenant conseiller secrétaire du roy en 1705. Les cadets deviennent mousquetaires. En 1792, Jean Jacques Noiret, capitaine au régiment de Champagne, émigre. L’ensemble de ses biens de Brive et de Malemort est vendu. A Malemort, il y a une quinzaine de lots, pour un total de 248 000 livres. La Grande Borie est achetée par Péronne négociant à Brive. (L’abbé Celerier dit qu’il l’a achetée aux Noiret, ce qui est faux.)

LE JAYLE

Le Jayle est sur les hauteurs, au-dessus de la route Brive-Tulle du XIXe siècle et du chemin de fer de 1862. En contre-bas du côté du Chambon se trouvait une villa gallo-romaine ou médiévale appelée Julhac citée en 933 et appartenant à un nommé Humbert qui la donne à l’abbaye de Tulle. Mme Macary (châteaux en Corrèze) cite une famille du Jayle qui aurait participé aux croisades au XIIIe siècle : c’est une légende. La véritable histoire du Jayle commence avec les Cosnac qui se titrent seigneurs du Jayle en 1486 soit par un héritage Faydit en 1451, soit par achat. Jean, alias Guillaume, est maître d’hôtel d’Annet de Cosnac cadet des vicomtes. Il est capitaine de Servières, où il possède le Domaine des Bordes en 1491 . Il meurt en 1 505. Sa fille, Françoise de Cosnac, épouse en 1520 Jean du Breuil seigneur de Chastanzeau qui se fait appeler du Breuil de Cosnac. D’où Antoine, époux en 1553 de sa cousine, Marguerite de Cosnac. Il est difficile de savoir si les Dubreuil habitent le Jayle ou plutôt Chastanzeau ou à partir de 1650 Chaveribiere*. En 1663, Jean Antoine du Breuil meurt, laissant le Jayle à sa fille Louise qui épouse Jean Charles Germain de la Pommélie. Là encore, l’ont-ils habité ? En tout cas, ils le conservent jusqu’à Léonarde de Maulmont veuve de Jean de la Pommélie et leur fils Jean Baptiste. En 1770, le Jayle est vendu 48 000 livres dont 14 000 L pour la dot de Marianne sœur de Jean Baptiste. L’acheteur est Joseph Cérou, originaire de Gignac, lieutenant criminel au sénéchal de Brive. C’est grâce à la dot de sa femme, Louise Valletaud, et à l’aide de son oncle Pierre Cérou (1709-1797) ancien précepteur de la fille du duc de Parme, qu’il a payé le Jayle à un prix « exorbitant ».
Joseph « de » Cérou meurt sans enfants en 1787 et laisse le Jayle à son frère Dominique. Le château peu habité au cours des temps tombe en ruine en 1789. Il n’en reste qu’un corps de logis découvert entre deux grosses tours que la Révolution va abattre. Dominique Cérou commence à en vendre les matériaux. Son fils, Joseph Cérou, médecin à Gignac, le vend en 1849 à Mercure Jean Joseph de Corn, marquis de Corn, pour 42 000 F en paiements échelonnés sur 5 ans. Dans la vente est compris le moulin de Claredent. MERCURE est le fils de Jean de Corn et de Caroline de Verlhac. Il a épousé en 1844 Marie Joséphine Dumas de la Vareille. Il vend le château de Queyssac hérité de son grand-oncle et fait construire au Jayle un château à l’italienne par Albrizzio. Il monte une usine de papier de paille au moulin de Claredent. Sa fille unique, Marie Caroline née en 1844, épouse en 1865 son cousin Jean Charles Dizac, fils de François Dizac et de Catherine de Corn. Sa dot est de 98 000 F moulin compris. Jean Charles Dizac, né à la Martinique, y revient souvent pour s’occuper de ses plantations. Ses deux fils, Francisque et Lof Gabriel dit Joe, s’occupent l’un du Jayle et l’autre de la papeterie. Après la mort de Marie Caroline de Corn en 1936, la papeterie est vendue aux papeteries du Limousin et le château aux Cassard, puis aux Aruis.