Une commune au riche passé

Malemort
Vue Générale de Malemort

Etendu sur son territoire

Ce texte s’inspire des travaux de fouilles réalisés durant l’année 2011 sur le territoire de la commune de Malemort et des extraits du bilan scientifique 2011 publié par le Service Régional Archéologique de la DRAC. 
Je remercie les deux responsables des chantiers de fouilles, ainsi que les deux ingénieurs d’études, Patrice Conte, spécialiste du Moyen-Age et Raphaël Gestreau, spécialiste de l’ Antiquité au sein du Service Régional de l ‘Archéologie. Ce service intégré à la DRAC est sous la responsabilité de Marine Fabioux, conservateur régional de l’archéologie. 

Le site de Cazaudet. Responsable du chantier de fouilles : Alexandra Hanry 

Une fouille préventive conduite sur 3,5 hectares fait suite à une opération réalisée en 2006 sur des terrains voisins. Elle a livré environ 900 structures dont des maçonneries qui se développent sur des axes orthogonaux. Le développement de ce site semble à son apogée entre le milieu du I er siècle et le milieu du II ème siècle. L’interprétation provisoire est celle, soit d’une vaste villa, soit une partie de vicus à vocation commerciale.

L’aspect le plus intéressant de cette fouille porte sur les questions de relations avec agglomération de Brive située à moins de 6 km et connue dès le le premier siècle de notre ère.

Suite au diagnostic réalisé en 2010, cette zone laissait présager d’une occupation dense sur l’ensemble de la surface à aménager. Les¾ de la surface prescrite ont été entièrement décapés pour laisser libre des zones dédiées au stockage des terres, à la circulation des engins et à une surface polluée par les hydrocarbures (ancienne cimenterie).

Aux observations annoncées, les premiers résultats sont à la hauteur de cette vaste fenêtre d’investigation puisqu’environ 900 structures archéologiques ont été observées.

Deux murs orientés nord-sud et distants d’environ 120 mètres structurent l’implantation de petites unités bâties en extérieur de ces deux axes, laissant au centre un espace presque libre. 

Il est important de noter que le site se développe vraisemblablement vers le sud en bordure de la RN 89 et vers la Corrèze ainsi qu’au pied des collines en direction du nord, encerclant le site. Des traces de bâtiments ont été remarquées à environ 80 mètres des structures les plus septentrionales de la zone prescrite.

Le chemin le plus occidental est installé au bord d’une dépression Nord-Sud qui devait accueillir un probable ruisseau ou une mare dans l’ancien lit d’un paléo chenal d’axe nord-sud. 

Entre cet espace de circulation et le grand mur d’au moins 300 mètres de long, une bande de 50 mètres de large a été aménagée avec au moins 9 bâtiments. Hormis le bâtiment le plus important qui a pour particularité de posséder des fondations de plus de 1 mètre de profondeur, la plupart des petits bâtiments de plan quadrangulaire sont construits sur fondation de solin ou tranchées de sablière. De plus, presque toutes ces constructions sont dotées d’un puits et 10 des 13 structures de puisage sont également alignées sur 2 axes nord-sud parallèles. Cette implantation témoigne d’une parfaite connaissance du milieu naturel puisqu’elles sont installées sur une rupture de pente en bordure d’une dépression centrale nord-sud, probable lit majeur de la Couze, permettant de recevoir les eaux de ruissellement à la base de deux niveaux graveleux. 

Le souvenir du site découvert lors des portes ouvertes organisées par l’INRAP reste en notre mémoire et ce sont seize unités d’habitat qui se sont dégagées avec au nord-ouest, le bâtiment puissamment fondé propose quatre phases d’aménagement : 
La phase la plus ancienne est apparue sous les constructions, sous la forme d’un réseau de tranchées de sablières et de trous de poteaux, témoins probable de tranchées de sablières et de trous de poteaux, témoins probable d’une première occupation en matériaux périssables.
– Succède à ces structures en creux, un petit bâtiment sur fondation de solin de grès et de schistes de 16 m par 7 m. L’agrandissement de cet ensemble de murs s’exprime ensuite par la mise en place d’une puissante fondation en schiste (plus d’un mètre de profondeur) formant un bâtiment d’environ 250 m. A l’ouest de ce dernier, quatre bases de maçonnerie, de forme ovalaire de l’ouverture mais carrée à la base. semble témoigner de la présence de piliers schistes de 16 m par 7 m. L’agrandissement de cet ensemble de murs s’exprime ensuite par la mise en place d’une puissante fondation en schiste (plus d’un mètre de profondeur) formant un bâtiment d’environ 250 m. A l’ouest de ce dernier, quatre bases de maçonnerie, de forme ovalaire de l’ouverture mais carrée à la base. semble témoigner de la présence de piliers monumentaux précédant la façade.

Au sud de cette construction a été mis en évidence un autre bâtiment qui propose au moins trois phases d’aménagements. Un réseau de canalisation de belle facture, à piédroit et couverture de schistes, est lié à cette zone humide. La première phase d’aménagement d ‘une construction bipartite de 70 m et les drains qui la contournent est mise en place sur le fossé. Enfin une série de petits bâtimenrs rectangulaires d’environ 6 à 7 m de côté, souvent en pièce unique, est présente au sud et à l’est de ces deux constructions. Sept sont implantés à l’ouest, au moins cinq entre les murs et deux ont été identifiés à l’est.

La relation aux trois cheminements empierrés découverts lors de cette fouille reste encore une énigme. En effet hormis la voie empierrée nord-sud de 2,5 m à 6 m de large, une autre voie de 6 à 8 m de large a été identifiée. Elle est axée nord-ouest /sud-est et pourrait suivre le cours de la rivière, en direction du gué préromain sur la Corrèze identifié en limite communale. Enfin un chemin ouest-est a également été observé. voie de 6 à 8 m de large a été identifiée. Elle est axée nord-ouest /sud-est et pourrait suivre le cours de la rivière, en direction du gué préromain sur la Corrèze identifié en limite communale. Enfin un chemin ouest-est a également été observé. 

Pour conclure nous ne pouvons évoquer nos premières réflexions sur la chronologie et caractérisation de ce site. Le plein essor du site semble se situer entre le milieu du I siècle de notre ère et le milieu du siècle suivant. L’ abandon intervenant à la fin du II ème siècle. 
Deux hypothèses nous paraissent les plus plausibles : villa ou vicus. Sur plus de 10 hectares s’étendent en effet, les restes d’une occupation dense et implantée très rigoureusement. Les grandes « villae » ne sont pas légion en Aquitaine romaine mais rien n’exclut l’existence d’un vaste domaine à l’entrée du bassin de Brive. D’autant que la répartition de petites unités d’habitation à l’extérieur de deux longs murs de clôture d’une cour rustique semble caractéristique de l’organisation des « villae ». Nous ne pouvons toutefois pas exclure l’existence d’un vicus à Cazaudet-Roumégoux. Doit-on imaginer un vicus à vocation économique et commerciale, organisé autour d’un foirail central ? 
L’agglomération artisanale de Briva est, de plus, attestée à moins de 6 km en aval au Ier siècle de notre ère. 
Reste à démontrer la hiérarchie et la relation des deux sites corréziens. 

Un document cartographique découvert aux Archives Départementales de Tulle

Lors de recherches documentaires aux archives départementales de Tulle et afin de compléter la localisation de certains ponts oubliés, nous avons découvert ce plan datant du XIXème siècle qui montre un ensemble de périmètres de propriétés et d’infrastructures. 
Ainsi le tracé du ruisseau «La Couze» rappelle celui actuel, de même que l’amorce du village de Cluzan sur la partie gauche du document. 
Toutefois la présence « du canal d’alimentation du moulin de Mr Corn » est remarquable. La famille de Corn était propriétaire du château de Puymaretz. 
Ce canal est exactement sur le périmètre des fouilles archéologiques citées plus haut et de la zone commerciale du Moulin (ainsi nommé fortuitement ou pas par l’aménageur). 
La présence sur ce plan du canal et du moulin permet de mieux comprendre la conservation du mur de plusieurs centaines de mètres découvert par l’équipe d’Alexandra Hanry (le moulin devait être en fonction au siècle dernier). 
La datation de cette construction. dans le temps. sera déterminée par les analyses actuelles engagées par l ‘INRAP.

Le site de Montemart. Responsable du chantier : Dimitri Paloumbas

A la demande de la municipalité ayant entrepris des démarches de protection en 2005, celle-ci souhaitait engager un programme de mise en valeur du site castral et de ses abords.

Je me souviens m’être entretenu à plusieurs reprises avec les historiens émérites de la Société Archéologique et Historique de Brive, Léon Dautrement, Jean-François Pérol, Yvon Chalard et Marguerite Guély qui me confiaient à chaque discussion la dimension historique, archéologique et patrimoniale du site de Montemart. Des documents, des objets, les traces de construction, le donjon, les souterrains attestaient de cette présence défensive médiévale permettant de contrôler par sa situation géographique l’activité économique et militaire de la région. 

Neuf sondages ont été pratiqués. Cinq sur la plate-forme dominant le vieux bourg, où se distinguent les vestiges d’une tour à contreforts, un sur le tracé du chemin périmétral séparant l’excroissance tabulaire d’une vaste zone plane, assimilée à un enclos aristocratique. Les trois derniers à l’intérieur de cet hypothétique enclos. 

L’étude archéologique a confirmé le fort potentiel archéologique du site, que les textes documentent à partir du Xlème siècle. 

Constituant le seul vestige médiéval en place sur toute la plate-forme, avant les travaux de sondages, la tour présente un état de conservation médiocre. Cet état est dû à d’importants dégâts ayant entrainé la démolition des trois-quarts de la carcasse du bâtiment primitif. Certains éléments de cette bâtisse se retrouvent dans les constructions érigées dans le bourg ancien. 

Le plan de l’édifice peut être restitué dans ses grandes lignes : une tour carrée, épaulée par huit contreforts, quatre contreforts d’angle enveloppant et quatre contreforts intermédiaires. Les deux pans de mur restants suggèrent de restituer une tour approximativement carrée, mesurant environ 8, 70 mètres de côtés hors œuvre. L’épaisseur des murs avoisine 2,80 mètres, laissant augurer un espace utile intérieur relativement modeste, de l’ordre de 15 m. Les deux sondages ouverts au pied de la tour, datée autour de la seconde moitié du Xlllème siècle, se sont révélés positifs. L’étude de leur comblement a surtout permis de dater l’abandon du bâtiment qui a peut-être suivi, de peu, sa destruction. 

L’un des sondages a mis à jour une structure maçonnée de grande ampleur, probablement un mur, contre la tour. Il a été dégagé sur toute la longueur nord-sud de l’excavation et correspond manifestement à un mur du bâtiment. Il s’agit, après observation, d’un mur à double parement avec un remplissage constitué d’une maçonnerie de moellons de grès liés au mortier. 

Une véritable énigme entoure cette mise à jour. Si le collage de maçonnerie avec la tour a été clairement identifié, rien n’indique qu’il faille restituer deux séquences chronologiquement distinctes. 

A l’ouest de la plate-forme, le sondage effectué a permis la découverte de deux aménagements sur le substrat dont une structure de support destinée à un bâtiment sur poteau. La présence d’une pierre liée au mortier de chaux, posée à plat sur le substrat géologique confirme l’occupation bâtie de l’extrémité occidentale de la plate-forme castrale. 

Un autre sondage met à jour plusieurs aménagements sur une surface permettant de constater la concentration d’au moins quatre aménagements : une structure maçonnée et trois structures en creux. 

A proximité de la villa 1900, la découverte de vestiges maçonnés qui pourraient être ceux d’un mur à double parement, établi selon un axe sud-ouest/nord-est et d’une épaisseur avoisinant 1,30 m. 

A l’ouest, près du mur bordant la plate-forme au nord, un autre sondage est engagé afin de préciser les caractéristiques techniques de cette construction. La fouille de cette zone a permis de mettre en avant la découverte d’un remblai chargé de céramiques médiévales. Beaucoup de questions restent sans réponse autour de la datation, de l’origine et des liens avec la construction de la tour. 

Un mur (période médiévale) ayant servi d’armature à une structure d’habitat et orienté parallèle à la pente a été mis à jour. L’utilisation d ‘une maçonnerie fourrée au mortier de chaux est aussi un indice susceptible de l’identifier aux vestiges d’un logis, plutôt qu’à un mur de soutènement ou à un mur parcellaire. L’utilisation d’une maçonnerie fourrée large d’un mètre s’avère remarquable et semble témoigner d’un bâtiment important occupé durant le Moyen-âge. 

Fouilles sur le site de Montemart

Le bilan de cette opération s’est révélé extrêmement positif. Plusieurs structures d’habitats ont été mises au jour, dont un mur qui semble révéler l’existence d’un bâtiment antérieur à la tour à contreforts, sur le sommet de la butte. L’occupation bâtie de l ‘enclos est pleinement confirmée. 
L’étude en cours du mobilier devrait permettre d’apporter des jalons chronologiques qui font actuellement défaut pour dater avec précision ces différents évènements. 

Voici très succinctement les résumés des riches travaux engagés par le Service Régional de I ‘Archéologie et ces différents acteurs. 
Le site de Cazaudet/Roumégoux est aujourd’hui urbanisé et seuls quelques terrains inoccupés peuvent encore délivrer éventuellement des traces archéologiques. Le vicus est réapparu par la construction de cette zone commerciale moderne et attractive dite du Moulin. Les attentes sont fortes sur le résultat des collectes faites sur place. 

Le site de Montemart est protégé par décision municipale. Des fouilles continueront à mettre en évidence la réalité d’un lieu historique méconnu mais qui a toujours suscité des investigations archéologiques.

Madame Guély a entraîné sur ce site, il y a quelques années ses élèves, Philibert Lalande, historien local qui avait observé les cavités et les souterrains, l’abbé Célérier rappelait la découverte d’une pièce Rayrnondaise sur le chemin bordant le site, les histoires et légendes enrichissaient aussi ce lieu, planté de vignes et théâtre de nombreuses barbaries. 

Notre association apportera son soutien et son aide aux chercheurs par la remise de documents d’archives, de conseils ou d’appuis sur leur démarche de recherches, ainsi que la présentation ou l’animation de conférences et expositions, lors de la semaine de l’archéologie en juin et de la journée du patrimoine en septembre. 

Daniel Freygefond